Qui serais-je, en plein été, si je n’écrivais un petit billet parlant de la mer ?
Premièrement, pourquoi ? Le mysticisme et l’ésotérisme est monnaie courante, dans ce genre musical, on parle d’histoire, de légendes, de guerres, de ninjas chevauchant des dinosaures… Il y en a pour tout les goûts. Pour ma part, vu que j’aime la flotte, j’ai toujours eu une certaine détermination à chercher des groupes aux thématiques aquatiques. Le fait est que ça manque pas. On va attaquer ce thème en présentant pas mal de groupes, avec des extraits musicaux bien sûr, à travers deux angles : La littérature, et le mysticisme pur et dur, mais vous allez voir que les deux se rejoignent.

I: LES BOUQUINS

« Mais Hakim, pour quoi tu veux nous parler de livres alors que nous ce qu’on aime c’est la baston ? »
« Jean-Viking, tais-toi ! »

Oui on va parler un peu de bouquins d’abord, ça fera plaisir à votre culture ! Je vais en aborder quelques-uns car vous n’êtes pas sans savoir que la littérature joue un rôle prépondérant dans l’inspiration de nombreux groupes. Et des textes qui se passent mer, on en a. Des classiques de la littérature même ! Et beaucoup ont été réinterprétés par des musiciens, même des connus ! De très connus ! Tu me crois pas ? Bon ok, exemple :

Profitez, c’est rare que je parle d’Iron Maiden. Ah mais c’est vrai, c’est pas ce que je vais faire. « The Rime of the Ancient Mariner » est un des poèmes les plus importants de la littérature britannique, paru d’abord en 1798, et écrit par un certain Samuel Taylor Coleridge.
Allez, va lire, copain :
https://www.poetryfoundation.org/poems/43997/the-rime-of-the-ancient-mariner-text-of-1834
Comme la reprise de Maiden, ce poème raconte l’épopée d’un navire maudit par les exactions de marins qui, sans se soucier des conséquences, ont abattu un albatros qui jouait vers leur navire. Le texte d’origine est plus long et plus complexe que les paroles de la chanson, mais le décalage temporel rend cela nécessaire. De plus, le poème d’origine est excessivement long pour une seule chanson, la réduction était inévitable. Mais dans l’ensemble, elle reprend la trame évoquée ci-dessus !

Avançons (non, je ne parle pas pas d’une partie de bas de ligne de pêche, et vous l’avez compris, je fais cette blague à moi-même).
Tu connais « Les Dents de la Mer » ?
« Hé ouais c’est le film de… » PAF!
« Je t’avais pas dit de te tenir, Jean-Viking ? »

Oui, le film de Spielberg, sorti en 1975, je connais… Adapté du roman de Peter Benchley, paru en 1974. Je vous raconte pas l’histoire, vous la connaissez à peu près. Il y a un groupe qui aime vraiment beaucoup les requins et cette oeuvre : les californiens de Squalus, menés par un certain Aaron John Gregory (mon idole, je ne le dirai jamais assez). A tel point que Peter Benchley est crédité comme un des membres du groupe en tant que parolier !

Squalus joue de Sludge bien crasseux, sans guitare, synths, drums and bass only !

Des exemples d’adaptations littéraires dans le thème, on en a d’autres. Baudelaire écrivait dans ses « Fleurs du Mal » un poème intitulé « L’Homme et la mer ».
Va lire :
https://fleursdumal.org/poem/113
Je n’en parle jamais assez, le groupe allemand The Ocean a repris à partir des traductions anglophones ce poème sur le premier CD du double album « Precambrian », en 2007.

Je reste encore un instant avec eux, car sur leur deuxième disque, « Aeolian », le premier morceau s’appelle « The City in the Sea ». Les vrais savent : C’est un poème célèbre de Poe, paru en 1845. Tu peux le trouver ici :
https://poets.org/poem/city-sea

On reste un instant dans les trucs connus. J’imagine que si je vous dis « Homère », vous me répondez « Simpson » ? J’espère que non. « L’Odyssée », un des poèmes épiques les plus fous de l’histoire de l’humanité, n’a jamais cessé de faire parler de lui. Les titans américains du power prog Symphony X ont repris dans un morceau non moins épique le voyage interminable d’Ulysse à travers les îles grecques. On trouve ce morceau dans l’album « The Odyssey », paru en 2002, il clôture l’album du haut de ses titanesques 24 minutes. Mais, profite, c’est un bon morceau ! Il doit sa longueur au fait que l’histoire qu’il raconte est elle-même démesurément longue, donc pour en dire un maximum le titre est découpé en plusieurs mouvements.

Je reviens en Allemagne pour l’incontournable, si je dois parler de bouquins, de la mer et de metal : AHAB. Ils appellent leur musique du « Nautik Funeral Doom ». La littérature nautique, si on se permet de l’appeler ainsi, faute de mieux, on la doit à Herman Melville, notamment, qui écrit quoi ? Oui ? J’entends Moby-Dick, très bien ! Dont un des principaux personnages s’appelle ? AHAB ! Bien, il y en a qui suivent. Le groupe a actuellement quatre albums et bosse sur le cinquième. J’ai hâte. TOUTE leur discographie s’inspire du même genre de littérature.
Premier album : « The Call of the Wretched Sea » => Moby-Dick, d’Herman Melville
Deuxième : « The Divinity of Oceans » => The Shipwreck of the Essex, Owen Chase
Troisième : « The Giant » => The Narrative of Arthur Gordon Pym of Nantucket, Edgar Poe
Quatrième : « The Boats of the ‘Glen Carrig' » => Roman éponyme, William H. Hodgson

Tout ça pour dire qu’on est à un certain niveau de « Dans le thème ». Je te mets pas de lien pour lire ces bouquins, tu peux les trouver facilement toi-même, mais je te préviens, c’est des pavés.

Un petit extrait du premier :

Et un petit extrait du dernier :

Si tu ne t’es pas encore noyé, je reviens sur Moby-Dick. T’as pas peur des cachalots, j’espère ? Ok, je te l’accorde, c’est gros et plein de dents. Mais bref, venons en au fait : Avant Ahab, il y a eu Mastodon. Ces géants d’Atlanta n’ont plus besoin de présentation. Leur meilleur album (Je ne suis pas objectif. En fait si. Mais non. Mais si.), sorti en 2004, se nomme « Leviathan ». Je ne parle pas du bouquin de Hobbes. Faut vraiment que j’arrête les blagues qui ne parlent qu’à moi.
Cet album est une réinterprétation de Moby-Dick et de ses éléments océaniques déments. Un chef-d’oeuvre de Prog/Sludge des années 2000.

Pourquoi est-ce que je tiens tant à te parler de Moby-Dick ? Ce n’est absolument pas parce que je viens d’écrire un mémoire dessus. Qu’on souhaite évoquer la mer dans son art, que ce soit pour sa beauté, ses insondables profondeurs, sa poésie inhérente, ou la folie obsessionnelle d’un passionné dégénéré, toute ce mystique de l’océan est exprimé et expliqué dans le texte. La mer, elle nous attire, tous, inexorablement. Elle attise le feu de nos âmes et nous submerge. Tu peux au moins lire le premier chapitre, où une bonne part de ce concept est développé. Ce mysticisme qui nous appelle, c’est le fondement de ce qu’il y a, à mon sens, dans toutes les oeuvres parlant de l’océan. Et personne n’en a parlé mieux que Melville. Et pourtant ce type était cinglé. C’est peut-être pour ça en fait…

II. La Mer : Source d’inspiration mystique

Il y a des groupes qui ne parlent QUE de la mer. La folie n’est pas morte, pas encore. Je pourrais reparler de The Ocean mais ça va finir par devenir lourd, vous avez l’habitude, avec moi (allez juste écouter toute leur discographie, n’oubliez surtout pas « Pelagial », hein). Je reviens donc vers Aaron Gregory, que j’ai mentionné plus haut avec Squalus. avant ça, il y avait Giant Squid. Toute la discographie du projet est inratable, mais je vais t’envoyer directement vers « The Ichthyologist », sorti en 2009, un des meilleurs albums de tous les temps.

Cet album raconte l’histoire d’un homme échoué, seul face à la mer, qui se prend de folie et de passion, qui survit… La perfection.
Retournons en Europe avec un groupe français : Atlantis Chronicles, un groupe pour lequel vous ne devez pas avoir peur de plonger dans les abysses. Actuellement, ils sont en train de préparer leur troisième album, pour lequel nous n’avons pas encore vraiment d’infos. Parlons du deuxième, à défaut. Déjà, on est dans quelque chose de très moderne, entre deathcore, death prog et death technique, de haute qualité. Le groupe a une certaine manière d’évoquer des courants marins par le son, en plus de la thématique abordée. L’album « Barton’s Odyssey » allie personnage historique et mysticisme marin. Otis Barton était un explorateur marin qui conçut un submersible, la bathysphère, pour tenter d’explorer les profondeurs. C’était dans les années 30.

On va aller un peu plus à l’Est pour proposer des alterner les styles. Les danois de Sunken proposent un black metal atmosphérique d’un excellent cru. Le mot « Sunken » signifie « englouti », donc préparez-vous à plonger sur de doux samples de vagues. Ici, on remarque que la mer est associée à son côté sombre et froid, et pourtant le morceau sait lui donner des dimensions épiques.

En Angleterre, le groupe Telepathy s’inspire énormément de l’océan aussi. Leur musique est instrumentale, et oscille entre post-rock, doom et post-black metal. Les fans de The Ocean s’y retrouveront sans doute. Leur album « Tempest », est particulièrement excellent, et passe très bien en live !

Il y a, comme on a vu, des groupes qui vivent pour la mer, ne parlent que de ça, ou presque. Cela dit, d’autres projets s’en servent pour un album en particulier, dans un concept précis, ou simplement pour un morceau qui souhaite employer ce thème.
Dans le cas de Belenos, par exemple, comme on peut l’imaginer d’un groupe breton, il fallait bien aborder le thème de l’eau à un moment donné. C’est ce qui fut fait dans l’album « Kornog », voulant dire simplement « Ouest » en breton. La jaquette annonçait dès le départ qu’on allait entendre la houle se fracasser sur les falaises de granit.

On reste un instant en France pour un incontournable dans ce délire aquatique : Alcest et l’album « Ecailles de lune », un long rêve à la dérive…

Dans un style tout autre, les progeux canadiens de Protest the Hero ont sorti un disque intitulé « Pacific Myth » entre 2015 et 2016, chaque morceau étant paru mois après mois, avec de superbes raies manta sur la cover.

Et pour finir, beaucoup furent les groupes, disais-je, à sortir des morceaux ou des albums, ici-et-là, évoquant la mer. En voici quelques très bons sans rentrer dans les détails !

Les italiens de Falaise et leur DSBM infusé de post-rock et shoegaze. Un morceau qui reprend très bien pour moi fantasme aqueux.

Oceano, connus pour leur deathcore de qualité, mais je crois que ce que je préfère au milieu du premier album, « Depths », c’est ça :

Dans un registre résolument sombre, l’album de Drown, « Unsleep », marque des points. Le compositeur est sans doute plus connu pour Tchornobog, mais présente ici un album de funeral doom très ambiant, sale et malaisant.

Kylver, un groupe de prog britannique, reprend l’histoire d’un cyclone ayant touché l’Angleterre il y a trois siècles de ça.

Il y a une quantité de groupes dont on aurait pu parler ici : Yob, Slow, Baroness, Cult of Luna, Devin Townsend, …and Oceans, Firtan, Hypno5e, Nydvind, Moonloop, Stormlord, Isis, Pelican… Je te laisse cherche ça tout seul, si la curiosité te réveille. Nous faudrait qu’on fasse une émission spéciale sur le sujet pour passer autant de morceaux.

Bon, à part ça la rentrée est proche, et on espère que tu nous écouteras encore tous les dimanches cette année, de 19h à 21h sur le 92.2 !

-Hakim

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